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Pourquoi l'Observatoire AfricTivistes de la démocratie

Mettre la recherche / Action au service des Démocraties Africaines

Par Dr. Adama Sadio

I. Introduction (contexte et justification)

En 1960, dix-sept (17) pays d’Afrique, notamment francophone, ont accédé à la souveraineté internationale. Si, certains Etats comme le Ghana et la Guinée sont indépendants avant 1960, de nombreux autres pays africains dont les anciennes colonies portugaises ne sont devenues souverains que dans les années soixante-dix (70). Un tel constat peut constituer une fenêtre ouverte amenant AfricTivistes à agiter des réflexions sur les dynamiques démocratiques de l’Afrique postcoloniale, l’introduction de dispositions limitant le mandat présidentiel à deux à la faveur des transitions démocratiques puis la sanctuarisation du mandat présidentiel suite à des constats de déverrouillage de la limitation des mandats. Des procédures qui semblent ne pas être étrangères à la résurgence des crises politiques aiguës parfois de l’irruption des militaires dans le jeu institutionnel. 

L’Afrique postcoloniale, caractérisée par une instabilité politique et institutionnelle permanente, a connu une relative stabilité suite au renouveau démocratique des années quatre-vingt-dix (90) dont l’un des principaux marqueurs est l’ouverture démocratique et la rationalisation du mandat présidentiel.

Ces avancées démocratiques à l’orée des années 90 ont été déclenchées par la combinaison de dynamiques exogènes (chute du mur de Berlin, implosion du bloc communiste, discours de La Baule, etc.) et des dynamiques endogènes (soif de liberté, échec des programmes d’ajustement structurels, etc.). 

Cette « décompression de l’autoritarisme » en Afrique pour reprendre Jean François Bayart s’est traduite par une consolidation démocratique des systèmes politiques africains, la tenue régulière d’élections multipartites et la limitation des mandats.

Moins d’une dizaine d’années après le renouveau démocratique, ce bond qualitatif dans la gouvernance politique en Afrique semble ne pas réussir à empêcher certains régimes africains à tripatouiller leur Constitution. La limitation du mandat du Président de la République à deux, un marqueur du renouveau du constitutionnalisme africain, a été supprimée dans beaucoup de pays d’Afrique subsaharienne.

Un subterfuge constitutionnel que des chefs d’Etat africains utilisent pour la conservation du pouvoir et empêcher tout espoir d’alternance démocratique. Ce fut le cas des pays comme le Burkina Faso avec Blaise Compaoré (1997), le Sénégal avec Abdou Diouf (1998), le Togo avec Gnassingbé Eyadema (2002), la Guinée Conakry avec Lansana Conté (2002), le Gabon avec Omar Bongo Odimba (2003), le Tchad avec Idriss Deby Itno (2005) et le Cameroun avec Paul Barthélémy Biya (2008), etc. Cette volonté expresse de certains Présidents africains de se maintenir au pouvoir a acté une rupture dans la relative stabilité politique et institutionnelle du continent en favorisant de lourdes crises politiques.

Les tripatouillages constitutionnels visant la conservation du pouvoir par les gouvernants sont-ils un indicateur, un signe annonciateur d’un processus de « recompression des autoritarismes » vaincus des années 90 ? Est- ce, la fin de « la culture de revendication » ou le déclin de la théorie « de la politique par le bas » (Jean- François Bayart, 1986) ? Les effets évidents de ce nouveau cycle des révisions constitutionnelles portant sur le mandat ne se limitent pas seulement à hypothéquer la circulation des élites au pouvoir. Ces révisions sont des foyers qui attisent la spirale de violences dont les coups d’Etat militaires constituent des illustrations concrètes. Tous les effets de cette pratique ne sont pas connus. Les inconnus ou l’enjeu de ces processus en cours impose au monde de la recherche et des défenseurs de la démocratie de mettre en place un dispositif de suivi et d’analyse des remises en cause des limitations des mandats présidentiels. C’est pourquoi AfricTivistes entend cerner tous les enjeux de cette politique d’accrochage au pouvoir, devenue « la mode » à travers la création de l’Observatoire AfricTivistes de la démocratie.

 

II. Description de l’Observatoire AfricTivistes de la démocratie

L'Observatoire AfricTivistes de la démocratie constitue un cadre conceptuel et opérationnel dédié à l'analyse des effets des processus de déconstruction des mécanismes de limitation des mandats présidentiels en Afrique. Bien au-delà de cette problématique spécifique, l'Observatoire se projette vers l'avenir en intégrant des actions et des recherches qui s'inscrivent dans une perspective plus large de gouvernance démocratique.


Sous la direction d'un Coordinateur et la supervision de la Directrice des Programmes et du Président d'AfricTivistes, l'Observatoire vise à traiter un éventail de thématiques interconnectées liées à la démocratie en Afrique. Il s'attachera à aborder des enjeux variés et complexes, allant de l'impact des technologies numériques sur la démocratie à la problématique de l'hyperprésidentialisme dans certains pays, en passant par l'ouverture de l'espace civique et les cadres légaux restrictifs.


En collaborant avec des chercheurs africains et des acteurs du changement, l'Observatoire s'engage à explorer ces questions cruciales, démontrant ainsi son intention de dépasser la simple étude des limitations de mandats pour embrasser une approche globale de la gouvernance démocratique sur le continent.


 III. Les objectifs de l’Observatoire AfricTivistes de la démocratie

Les Objectifs sont :

- Constituer des équipes pluridisciplinaires de recherche sur les déverrouillages de la limitation des mandats présidentiels en Afrique ;

- Créer et alimenter une banque de données sur les « prises en otages » des règles constitutionnelles et politiques en Afrique ;

- Mettre en place un cadre de recherche-action sur les passages en force dans les processus de dévolution du pouvoir d’Etat en Afrique.

 

IV. Les activités de l’Observatoire


  • Elaborer et conduire des projets de recherche sur le phénomène de la déconstruction sociopolitique des limites des mandats présidentiels ;
  • Disséminer les résultats de recherche à travers des publications, des ateliers de restitutions, des colloques et des séminaires de formations sur les conséquences néfastes des modifications de la limitation des mandats présidentiels ;  
  • Réaliser des plaidoiries auprès des acteurs pour le respect des textes initiaux et sur les impacts négatifs des projets de modification des règles du jeu politique ;
  • Mener des activités de sensibilisations, de conscientisation des citoyens notamment des jeunes et des femmes sur les impacts de leurs engagements politiques dans les processus de mise en œuvre des projets de modifications des limites des mandats présidentiels ;
  • Réaliser des supports multimédias de sensibilisation sur les bonnes et mauvaises pratiques qui impactent la gouvernance démocratique en Afrique.  

 

tables and chairs inside the hall



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