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Impacts et conséquences de la non-limitation des mandats présidentiels sur le bien-être socio-économique en Afrique

Equipe de recherche :

SOME Yasmina Assetou (Burkina Faso)

ILBOUDO Assia Sara Malika (Côte d’Ivoire)

Angèle Clarisse MENDY (Sénégal)


LISTE DES SIGLES ET ACRONYMES

 CEDEAO: Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest

CEFDEL : Centre d’Etudes pour le Financement du Développement local

CEMAC: Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale 

CEN: Commission Électorale Nationale 

CLPS : Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté

FMI : Fond Monétaire International

IDE : Investissement Direct à l’Etranger

IDH : Indice de Développement Humain

IGE : Inspection Général d’Etat

IPC : Indice de la Perception de la Corruption

ISC : Institution Supérieure de Contrôle

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Économique

OIT : Organis ation Internationale du Travail

ONG : Organisation Non Gouvernementale

ONU : Organisation des Nations Unies

ONUDC : Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime

PIB : Produit Intérieur Brut

PNPS : Politique Nationale de Protection Sociale 

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement 

UA : Union Africaine 

UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africaine 


RÉSUMÉ 

Les présidences perpétuelles, résultant de la suppression des limitations constitutionnelles des mandats dans certains pays africains, représentent une grave menace pour la démocratie et le développement socio-économique du continent. Cette étude se propose d'analyser en profondeur leurs impacts néfastes sur le bien-être des populations. 

D'un point de vue socio-politique, les résultats mettent en lumière une dynamique de concentration tous azimuts des pouvoirs entre les mains du chef de l'Etat. Celui-ci s’emploie à domestiquer méthodiquement l’ensemble des contre-pouvoirs institutionnels censés assurer les contrepoids démocratiques. L'appareil judiciaire est notamment instrumentalisé à des fins politiques et partisanes pour museler toute voix dissidente, instaurant durablement un État de non-droit. Cette confiscation autoritaire du pouvoir attise par ailleurs les tensions, les violences politiques et les troubles récurrents à la cohésion sociale.

Sur le plan économique, l'absence criante d'alternance au sommet de l'Etat favorise la prévalence d'une gouvernance opaque et d'une corruption généralisée. Les détournements massifs des deniers publics au profit des clans présidentiels paralysent l'investissement et plombent les activités productives. 

Face à ce bilan, une série de recommandations ont été formulées visant à remédier à ces dérives anti-démocratiques et à préserver l’Etat de droit ainsi que le développement socio-économique.


Mots clés : mandat présidentiel - mal gouvernance - Etat de non-droit - corruption - instabilité politique



SUMMARY

Perpetual presidencies, resulting from the abolition of constitutional term limits in some African countries, represent a serious threat to democracy and the socio-economic development of the continent. The aim of this study is to provide an in-depth analysis of their harmful impact on the well-being of the population. 

From a socio-political point of view, the results highlight a dynamic of all-out concentration of power in the hands of the head of state. The latter is methodically domesticating all the institutional checks and balances that are supposed to provide democratic checks and balances. In particular, the judiciary is used for political and partisan ends to muzzle any dissenting voice, creating a lasting state of lawlessness. This authoritarian seizure of power also fuels tensions, political violence and recurrent disturbances to social cohesion.

On the economic front, the blatant absence of alternation at the top of the State favors the prevalence of opaque governance and widespread corruption. Massive misappropriation of public funds for the benefit of presidential clans is paralyzing investment and undermining productive activities. 

A series of recommendations have been formulated to remedy these anti-democratic excesses and preserve the rule of law as well as socio-economic development.


Keywords: presidential mandate; bad governance; lawless state; corruption; political instability





INTRODUCTION 

Des indépendances aux transitions démocratiques des années 1990, la démocratie en Afrique a vécu des balbutiements qui ont amené Jacques Chirac, lors d’un déplacement sur le continent, à soutenir que « l’Afrique n’est pas encore prête pour la démocratie. (…). La démocratie est un luxe pour l’Afrique ». A l’analyse des faits, l’un des facteurs explicatifs ayant causé cet état démocratique qu’admonestaient certains partenaires de l’Afrique dont François Mitterrand au point d’assujettir l’aide publique au développement française aux pays africains au respect et à la promotion des valeurs démocratiques est relatif à la présidence viagère de fait ou de droit en Afrique. Sous ce rapport, la rationalisation de la fonction présidentielle s’imposait comme un des chantiers majeurs du renouveau du constitutionnalisme africain dans les années 1990. Le poste de Premier ministre fut créé ou restauré et la Constitution prévoit désormais voire verrouille le mandat présidentiel à deux dans l’essentiel des pays d’Afrique subsaharienne à la faveur des transitions démocratiques. Une avancée démocratique majeure qui est susceptible de largement contribuer à la pacification du jeu politique et à la stabilité politique et institutionnelle du continent. La quasi-totalité des conflits en Afrique sont liés à l’institution présidentielle. 

Cependant, moins d’une décennie après ce tournant démocratique, des Présidents africains sont revenus sur la limitation du mandat présidentiel dont Blaise Compaoré fut le pionnier. Cette spirale de tripatouillage constitutionnel que d’aucuns assimilent à un coup d’Etat constitutionnel s’accompagne dans beaucoup de pays d’une spirale de tensions politiques aboutissant parfois à des violences électorales voire des conflits présentant une dimension identitaire. Le développement étant corolaire à la paix sociale, ces instabilités socio-politiques impactent négativement sur le vivre ensemble et la situation micro et macro-économique des pays concernés. 




  1. Contexte et justification

La limitation des mandats présidentiels à deux en Afrique est une question qui revêt d'une importance cruciale. Bien qu'il existe une diversité de régimes politiques en Afrique, la gouvernance africaine finit souvent par se caractériser par la consécration du pouvoir entre les mains d'une seule personne ou d'un petit groupe de personnes qui dirigent à leur guise. 

Une fois élus, la tendance qu'ont la plupart des dirigeants africains est de tripatouiller la Constitution et de recourir à différentes sortes de mécanismes non-transparents dans l'unique but de se maintenir au pouvoir, et ce malgré la volonté populaire. 

En effet, les pays considérés comme modèles de démocratie dans le monde sont ceux dont les figures de Leadership se renouvellent à intervalles réguliers. La circulation des élites au sommet de l’Etat est une réalité. Ceci permet aux citoyens d'expérimenter une variété de Leadership et de choisir les dirigeants dont les propositions concordent le mieux avec leurs aspirations par le biais des élections, qui constituent le moment de sanctionner positivement ou négativement les mandataires. Cette rotation du leadership politique dans l’appareil d’Etat permet aux élections de remplir pleinement leur rôle de dévolution pacifique du pouvoir, de pacifier le jeu politique, consolider les institutions et de renforcer la qualité de la gouvernance économique et démocratique. La valse des élites à la gouvernance du pays pourrait bien contribuer à la réalisation du principe de reddition des comptes.  

Cependant, il nous est donné de constater que cette norme démocratique qui permet le renouvellement régulier de Leadership est souvent problématique dans certains pays en Afrique. Non sans conséquences, ces magouilles auxquelles recourent des dirigeants africains pour assurer la perpétuité de leurs mandats ont comme effet de nuire la paix et la stabilité de leurs pays. Dans certains cas, des acteurs de l’opposition et de la société civile manifestent farouchement leur désaccord à travers des séries de manifestations dont la répression parfois conduit à des drames humanitaires et constitue une rupture à la paix sociale et politique. Non seulement, la volonté de se présenter à une troisième candidature se réalise en général avec un tripatouillage constitutionnel qui sape l’Etat de droit, mais prive le peuple de la liberté de changer de dirigeants ou de choisir le dirigeant qui leur convient le mieux comme voudrait la norme. 

En ce qui concerne les dégâts qui en résultent, les populations semblent être celles qui en pâtissent le plus. L'ordre social se retrouve bouleversé, les activités économiques sont affectées, la paix et la stabilité remises en cause. 

A la lumière de ce qui précède, il apparait important de determiner : Quels sont les impacts et conséquences de la non-limitation des mandats présidentiels sur la vie socioéconomique dans les pays en Afrique ?


  1. Objectifs de recherche

Au regard de la problématique qui se pose à nous, l’objectif de cette étude est donc : Analyser les effets des mandats présidentiels illimités sur les dynamiques sociopolitiques et économiques des pays africains. 

Cet objectif se décline en objectifs spécifiques suivants :

  • identifier les conséquences socio-politiques des mandats présidentiels illimités ;
  • analyser les effets de la non-limitation des mandats présidentiels sur le développement économique et social ;
  • proposer des solutions pour une gouvernance démocratique efficace en faveur du développement des sociétés africaines.

 

  1. Méthodologie de la recherche

« Le but de la science est une connaissance et une compréhension meilleures de tout ce qui existe ». C’est pourquoi la recherche scientifique obéit à des procédures scientifiques dont l’objectif est de cerner avec efficacité les phénomènes observés. La méthodologie pourrait être définie avec Madeleine GRAWITZ comme « l’ensemble des opérations intellectuelles par lesquelles une discipline cherche à atteindre les vérités qu’elle poursuit, les démontre, les vérifie »

Pour mener à bien notre recherche, nous privilégierons une démarche de type purement qualitatif. Elle se déroulera en deux étapes : la recherche documentaire et les entretiens.

  1. Recherche documentaire 

L’une des sources de données auxquelles nous avons fait usage pour mener cette recherche est la documentation. Elle nous a permis d’obtenir des données qualitatives sur les impacts et conséquences socio-économiques de la non limitation des mandats dans des pays en Afrique. Les sources documentaires nous ont permis  également d’appréhender la perception que les acteurs des secteurs formel et informel, de la classe politique, de la société civile, etc. sur le sujet étudié. La recherche documentaire nous a amenées à consulter des ouvrages, des articles scientifiques et de presse et à consulter aussi des rapports d’activités, des rapports de recherche, des discours, des vidéos, etc. Toutes les données documentaires ayant trait à notre thématique de recherche ont été répertoriées. Cette démarche nous a permis de collecter des données informationnelles relatives aux perceptions et représentations des populations sur les impacts et conséquences socio-économiques de la non limitation des mandats. Par-delà la recherche documentaire, nous avons fait usage de l’entretien semi-directif pour la collecte de sources orales. 

  1. Entretiens semi-directifs

Recourir à l’entretien au vu de la thématique et des objectifs de notre rapport nous a semblé un exercice indispensable. Les guides d’entretien nous ont permis de recueillir des données qualitatives répondant aux objectifs de la recherche. Les différents guides d’entretien administrés aux personnes-ressources ont été articulés autour des questions relatives aux impacts et conséquences de l’illimitation du mandat présidentiel sur le continent. 

Des entretiens-semi directifs ont été réalisés avec des personnes ressources choisies au regard de critères prenant en compte l’importance de leur statut dans les secteurs étudiés pour recueillir des informations pertinentes susceptibles de nous amener à mieux saisir l’objet de notre rapport. Pour le traitement de ces données qualitatives, nous avons procédé à une analyse des thématiques après la transcription des entretiens. Le choix de la technique d’entretien semi-directif s’analyse par l’intérêt qu’il présente pour notre recherche. En effet, l’entretien semi-directif offre une souplesse dans l’application du guide d’entretien. 

  1. Echantillonnage 

Pour s'assurer de la qualité et de la pertinence des informations recueillies auprès des enquêtés, nos entretiens se sont effectués avec des personnes rigoureusement choisies par le recourt à la technique d’échantillonnage raisonné. Ce procédé implique donc une sélection des personnes à interroger en se basant sur des critères qui ont permis à ces personnes de répondre au type idéal par rapport aux objectifs de notre recherche. 

Ces personnes se catégorisent en experts dans le domaine de l'économie, de la sociologie, de la science politique et des relations internationales, membres de la société civile, acteurs économiques. Trois entretiens ont été réalisés au Sénégal, et deux au Togo, au Burkina Faso et au Cameroun. 

  1. Définitions des mots clés

- Néo-patrimonialisme

Selon Jean-Francois Médard, « Le néo-patrimonialisme caractérise un type de gestion politique où les sphères publique et privée se confondent au sommet de l'appareil d'Etat. » En effet, pour l'auteur, en Afrique il n'y aurait aucune distinction entre le domaine public et le domaine privé dans la gestion des affaires de l'État, « le chef organisant son pouvoir politique comme l'exercice de sa gestion domestique ». La confusion du public et du privé dans la conduite des affaires de l'État fait pour ainsi dire des États africains, des entreprises politiques à caractère néo-patrimonial.

Cette définition rejoint celle plus synthétique de Mamadou Gazibo qui soutient que : « La patrimonialisation consiste en l'accaparement de la gestion de l'État par une minorité qui se l'approprie comme un bien privé et familial. »

On retrouve chez les deux auteurs l'idée centrale d'une confusion délétère entre les intérêts publics de l'Etat et les intérêts privés d'un groupe restreint accaparant le pouvoir suprême. La patrimonialisation se caractérise donc par une privatisation de fait de la sphère publique étatique. Les ressources, prérogatives et institutions de l'État ne sont plus gérées dans une optique d'intérêt général mais bien comme un patrimoine personnel que s'approprie une minorité. Cette dynamique s'accompagne inévitablement d'une concentration abusive de tous les leviers du pouvoir politique, économique et sécuritaire au sommet, au détriment du fonctionnement normal des contre-pouvoirs institutionnels. Comme le souligne Gazibo, l'État patrimonial devient une « propriété familiale » transmise par héritage.

Dans un tel système néo-patrimonial, la frontière entre sphères publique et privée s'estompe complètement. Les décideurs suprêmes utilisent les ressources régaliennes pour servir leurs intérêts personnels et claniques plutôt que l'intérêt collectif. Une véritable prédation des biens publics s'installe au profit d'une oligarchie régnante. La patrimonialisation représente donc une dérive autoritaire majeure où l'État est dénaturé, vidé de ses fondements républicains pour devenir la chose privée d'un prince et de ses affidés.

- Etat de non droit

René Otayek définit l’Etat de non droit comme : « Une situation où les règles de droit positif et les procédures légales cessent d'être appliquées et respectées de manière systématique par les autorités étatiques elles-mêmes ». Dans un tel contexte, le fondement même de l'État de droit s'effondre, à savoir la soumission du pouvoir politique et administratif aux normes juridiques établies. Ce ne sont plus les lois qui régissent le fonctionnement de l'État mais l'arbitraire des décideurs qui s'affranchissent délibérément du cadre légal.

L'État de non-droit représente une négation totale des principes constitutionnels de séparation des pouvoirs et de hiérarchie des normes. L'exécutif concentre l'intégralité des prérogatives sans subir aucun contrôle législatif ou juridictionnel effectif. Le pouvoir se substitue complètement à la règle de droit. Cette situation s'accompagne inévitablement de graves dérives autoritaires et d'atteintes systémiques aux droits et libertés fondamentaux des citoyens. L'appareil judiciaire n'est plus qu'un instrument de répression aux mains du Prince (comme dirait Machiavel). Toute voix dissidente est bâillonnée par une justice inféodée au fait politique. Dans un État de non-droit, les gouvernants ne rendent plus des comptes aux lois et à la Constitution mais exercent un pouvoir discrétionnaire absolu sans aucun contre-pouvoir. 

-Instabilité sociopolitique

Selon Gupta Danemark, l’instabilité sociopolitique englobe l’ensemble des troubles, désordres provoqués par des hommes politiques qui se déroulent à l’intérieur d’un État. Il propose une définition large. Pour lui, l’instabilité sociopolitique se présente sous trois formes : l'instabilité d'élite ou de l'exécutif qui englobe les coups d'Etat, les changements et crises de gouvernement, l'instabilité de masse qui correspond aux mouvements sociaux tels que les grèves, les manifestations ou les émeutes, enfin l'instabilité armée ou violente prenant en compte la guerre civile et les guérillas et toute action politique violente ». 

Selon Jana Krause, « les conflits communautaires sont des conflits armés non étatiques entre deux ou plusieurs groupes sociaux. Certains causent des nombres de morts à deux chiffres, tandis que d’autres atteignent facilement le niveau d’une petite guerre civile. Si un conflit communautaire tue plus de mille personnes par an, nous le définissons comme une guerre communautaire ». Pour l'auteur, les conflits communautaires sont des conflits internes qui opposent deux ou plusieurs groupes ethniques présents dans un pays. 

Dans certains domaines, les conflits communautaires sont appelés « conflits ethniques », « violences religieuses », « violences entre agriculteurs et éleveurs » ou « affrontements tribaux ». De tels termes peuvent décrire un aspect important de ces conflits, mais aussi dissimuler leur complexité. Dans la recherche sur les violences électorales, les violences communautaires sont communément appelées « émeutes », mais le terme est problématique parce qu'il suggère de petits affrontements spontanés liés à des manifestations, même si de nombreuses violences liées aux élections sont organisées, préméditées et ont pour origine des tensions communautaires de longue date. Dans la littérature sur le maintien de la paix et l'instauration de la paix, les conflits communautaires ont tendance à être appelés « conflits locaux », en dépit du fait qu'ils sont liés à la politique d'élite au niveau national et aux structures institutionnelles de l'Etat.

Mal gouvernance

Depuis l’introduction du vocable « bonne gouvernance » dans les années 90 par les institutions de Bretton Woods notamment la banque mondiale dans une logique de critique de la gestion publique des gouvernements africains, jugées inefficaces dans leurs réponses aux urgences économiques, les initiatives de « bonne gouvernance » se posent d’abord comme condition sine qua non à la sortie de crise et au développement économique puis comme critère à respecter pour bénéficier des fonds de la banque.  Elle émerge sur la scène internationale comme un concept plus facile à évoquer qu’à définir.  

Aux définitions multiples et variées, la bonne gouvernance est perçue comme une gestion publique efficace des ressources économiques permettant de garantir les intérêts généraux de la population. Loin d’être réduits au volet économique, ses effets s’étendent au bien-être global de la société. En d’autres termes, « Par ses effets, la thématique de la bonne gouvernance investit les secteurs public et privé, conditionne la qualité de l'environnement économique dans lequel évoluent les agents à travers le respect de la règle, la limitation des comportements prédateurs et de recherche de rentes, la limitation de la corruption et des libertés civiles. » 

Au regard de son caractère clé dans l’obtention des aides publiques et de son importance pour le développement du continent africain, les organisations régionale et sous-régionales du continent africain telles que l’UA, la CEDEAO, l’UEMOA ne manquent pas à la promotion des valeurs de bonne gouvernance sur le continent en les inscrivant dans leurs textes normatifs. 

Bien qu’ayant des formulations diverses, les textes relatifs à la bonne gouvernance font tous état de principes ou caractéristiques clés qui incluent sans être restreint au, respect des droits humains, à la reddition des comptes et la transparence dans la gestion de la chose publique tout en luttant contre la corruption. 

Par opposition à ce qui précède, la mauvaise ou mal gouvernance décrit une situation de gestion gouvernementale inefficace, irresponsable ou corrompue. Elle fait référence à un paysage où les règles de bonne gouvernance sus-évoquées font défaut, obstruant ainsi au développement socio-économique d’une part et affectant la paix et la stabilité du pays d’autre part.

Partie I : Impacts socio-politiques de la non-limitation des mandats présidentiels


La non-limitation des mandats présidentiels est au centre des préoccupations internationales. En Afrique, la question de l’alternance démocratique au sommet de l’Etat devient une quête permanente. Force est de constater qu’au terme de leur second mandat, les dirigeants africains pilotent des changements constitutionnels dans le but de rester au pouvoir et font face à la clause de limitation. Ces chefs d’Etats refusent de faire jouer les règles de l’alternance démocratique et ce malgré la volonté populaire. 

C’est ainsi qu’on assiste à des tensions consécutives causées par une tentative de contournement de la clause de limitation. De ce fait, les citoyens, l’opposition et la société civile expriment un sentiment de ras-le-bol à travers des manifestations pour un changement de leader à la fonction présidentielle. Ces séries de manifestations sont violemment réprimées occasionnant d’importantes pertes en vies humaines et des dégâts matériels. Cependant, on constate une régression démocratique de certains pays africains dans la mesure où il prive les citoyens du choix de leurs dirigeants. La non-limitation des mandats présidentiels affecte la qualité des institutions démocratiques par une confiscation des pouvoirs et rend la justice sujette à des manipulations.

En effet, la non limitation des mandats présidentiels met en péril l’État de droit dans la mesure où il affecte l’équilibre des pouvoirs et sape les droits et libertés fondamentaux de l’Homme. 

À la lumière de ces considérations, nous examinerons les violences et instabilité socio-politiques (Chapitre I) avant d’aborder la patrimonialisation du pouvoir et l’affaiblissement des institutions (Chapitre II).


Chapitre I : Violences et Instabilité socio-politiques

La pérennisation au pouvoir de certains dirigeants africains entraîne une instabilité socio-politique au sein des États. Cette situation d’instabilité politique et sécuritaire est causée par une frustration des populations animées par une soif de renouvellement démocratique notamment de l’alternance au sommet de l’Etat. Cette patrimonialisation du pouvoir se manifeste d’abord par des troubles à la cohésion sociale notamment des violences politiques (A), certains dirigeants africains dans le but de s’éterniser au pouvoir opèrent des révisions constitutionnelles ou parfois manipulent les résultats des élections occasionnant des manifestations sanglantes qui entravent les droits et libertés fondamentaux de l’Homme. Mais également, cette situation peut dégénérer en conflit ethnique, avec l’émergence d’un sentiment d’exclusion qui engendre des conflits liés à l’appartenance ethnique provoquant une division sociale (B).


  1. Troubles à la cohésion sociale : Violence politique 

La non-limitation des mandats présidentiels n’est pas sans conséquences sur la stabilité politique et le développement social d’un pays.

En Afrique, on constate au cours de ces dernières années l’apparition des conflits politiques liés aux modifications constitutionnelles visant à proroger le nombre de mandat présidentiel. Certains dirigeants africains prétendus démocrates  au terme de leurs mandats ont tendance à modifier les règles constitutionnelles à leur convenance afin de s’éterniser au pouvoir. Le système des présidences à vie dans le but d’accaparer ou de personnaliser le pouvoir est génératrice d’instabilité politique et sécuritaire dans les États concernés. Du Togo au Mali en passant par le Burkina Faso et le Cameroun, les révisions constitutionnelles de contournement de la clause de limitation de mandats ont abouti à l’instabilité politique et sociale causant d’innombrables dégâts matériels et d’importantes pertes en vies humaines. La République démocratique du Congo sous l’ère de Joseph Kabila ne fait pas exception à la règle. À titre d’exemple, de 2015 à 2016, les dirigeants de pays comme le Burundi, le Rwanda, la République démocratique du Congo ainsi que la République du Congo, sont parvenus à outrepasser la limitation des mandats présidentiels. 

Lors de ces tripatouillages constitutionnels, on constate que la contestation de leur candidature par la population ou la société civile est violemment réprimée ; ce qui aboutit à d’importantes pertes en vies humaines et instaure l’instabilité politique et sécuritaire. 

En République démocratique du Congo où les manœuvres pour modifier l’article sur le nombre de mandats sont en cours depuis 2014, on dénombre 42 morts, des blessés graves et d’importants dégâts matériels (selon la Fédération Internationale des Droits de l’Homme au Congo). Au Burkina Faso, la tentative manquée de Blaise Compaoré en octobre 2014 a conduit à la mort d’au moins trois personnes, à l’incendie du siège de l’Assemblée Nationale et à de nombreux dégâts matériels dans le pays. Au Cameroun, durant la période du changement de l’article sur la limitation du nombre de mandats du Président en 2008, on a décompté une centaine de morts (Rapport de l’Observatoire National des Droits de l’Homme 2008-2010). 

C’est dans ce contexte de tensions sociales que les droits et libertés des populations sont bafoués. On assiste à des interdictions systématiques d’exercer son droit à la manifestation en allant jusqu’à des incarcérations pour cette raison. La liquidation des opposants politiques les poussant à l’exil ou leur emprisonnement est une pratique courante. Cette situation provoque une frustration chez les populations qui subissent une restriction de leurs droits civiques. Ce constat d’instabilité politique et sécuritaire causée par la non-limitation des mandats est valable pour plusieurs États africains dont le Cameroun depuis la modification constitutionnelle sur l’article portant sur la limitation des mandats présidentiels.   

De ce fait, on note également une baisse du niveau de vie de la population camerounaise notamment par l’augmentation du coût de la vie. Le non renouvellement de la classe dirigeante impacte le bien être socio-économiques des États concernés dans le sens où elle accentue la pauvreté. Le non-respect des règles de l’alternance démocratique a également des répercussions sur la cohésion sociale du pays et entraîne une patrimonialisation du pouvoir. 

En définitive, le mandat de trop est sans conteste un facteur supplémentaire d’instabilité politique comme dans beaucoup de pays cités. Cette contestation de l'ordre dirigeant peut engendrer le retour des militaires sur la scène politique ainsi que les violences électorales qui nuisent gravement à la coexistence nationale. Il met aussi en péril les droits et libertés fondamentaux de l’Homme en limitant le choix démocratique des citoyens. Les pays ayant eu des micmacs constitutionnels de certains dirigeants dans le but de s’éterniser au pouvoir, sont plus sujets à des violences socio-politiques graves pour la population pouvant aboutir à des conflits internes ou politiques. Les instabilités sociales et politiques peuvent entraîner l’exacerbation des tensions communautaires notamment l’apparition des conflits ethniques que nous allons approfondir dans la partie suivante.

 

  1. Exacerbation des tensions communautaires 

L’identité est parfois perçue comme source d’instabilité politique dans plusieurs États africains. Selon Greoff Harris et Neryl Lewis, les conflits intra étatiques sont parfois causés par « le facteur identitaire ». D'après ces auteurs, le facteur identitaire augmente les risques de tensions communautaires au sein d'un État. Le facteur identitaire met en exergue le lien qui existe entre l'identité (ethnie) et les crises internes dans un pays. La non-limitation des mandats entraîne une marginalisation d’une partie de la population.

Les tripatouillages constitutionnels sur l’article portant sur la limitation du nombre de mandats présidentiels aboutissent parfois à des conflits ethniques. En effet, la non limitation des mandats est bel et bien un facteur qui conduit à un dérapage ethnique.

« Les conflits identitaires portent sur des « différends culturels, économiques, juridiques, politiques ou territoriaux entre deux ou plusieurs groupes aux origines différentes ». 

Par ailleurs, il est constaté dans plusieurs pays africains la problématique de l’identité liée à la non-limitation des mandats présidentiels. La non-limitation des mandats favorise l’ethnocentrisme. Il y a un lien entre la non limitation des mandats et l’exacerbation des tensions communautaires. 

Dans un contexte pré-électoral, l’appartenance ethnique devient un réel enjeu dans la conquête du pouvoir. En effet, dans les pays où un dirigeant africain appartenant à un groupe ethnique s’éternise au pouvoir, on constate parfois une exacerbation des tensions communautaires entre l’ethnie au pouvoir et celle de l’opposition. Cette longévité tend à privilégier une ethnie ou groupe de personnes au détriment des autres. En effet, ce sentiment d’exclusion conduit à une détérioration du climat social notamment par une séparation des groupes ethniques au sein d’un État.

C’est dans ce contexte que la non-limitation des mandats présidentiels accentue l’exacerbation du tribalisme dans le sens où il suscite des affrontements fondés sur l’appartenance ethnique. Cette situation est remarquée dans certains pays africains où leurs dirigeants modifient la constitution dans le but de s’éterniser au pouvoir. Dans un contexte actuel, l’ethnocentrisme devient un sujet sensible dans certains pays dans la mesure où il peut être à l’origine de tensions communautaires qui suscitent des effets délétères sur la stabilité politique et la cohésion sociale d’un État. La non-limitation des mandats est vectrice de troubles politiques pouvant parfois dégénérer en conflit ethnique. En Guinée et notamment au Cameroun, les contextes sont distincts.

En Guinée, l’exacerbation de l’ethnocentrisme est réel durant les processus électoraux des présidentielles opposant notamment Cellou Dalein Diallo (Peulh) à Alpha Condé (Malinké) par des violences basées sur l’appartenance ethnique. 

Au Cameroun la remarque est ainsi faite par le Professeur Aymar BEKONO pour qui « l’exacerbation du tribalisme lors des élections présidentielles de 2018 qui a opposé deux groupes ethniques, celui au pouvoir c’est à dire celui dont est issu le président Paul Biya, qui est le groupe ethnique Fangs et l’autre groupe contestataire Bamiléké ». Cependant, la non-limitation des mandats présidentiels exacerbe les tensions communautaires et nuit à la coexistence sociale.

Toutefois, dans certains États africains cette manipulation des tendances ethniques n’aboutit pas à une division sociale mais conduit uniquement à l’émergence d’un sentiment d’insécurité chez le citoyen. 


Chapitre II : Patrimonialisation du pouvoir et affaiblissement des institutions

L'une des principales dérives observées dans les régimes où les mandats présidentiels ne sont pas limités est la confiscation progressive de tous les leviers du pouvoir par le chef de l'État et son entourage proche. Cette concentration abusive des pouvoirs s'opère bien souvent au détriment des autres institutions censées assurer les contrepoids démocratiques et l'équilibre des pouvoirs. Ce phénomène de patrimonialisation de l'Etat se manifeste d'abord par un asservissement méthodique des institutions étatiques (A), le pouvoir exécutif s'arrogeant un contrôle quasi-total sur les autres branches constitutionnelles. Mais cette dynamique s'étend aussi à la sphère judiciaire, avec une administration de la justice qui devient de plus en plus inique et partielle (B), minant les principes fondamentaux de l'État de droit.


  1. Asservissement des institutions étatiques

L'une des conséquences majeures de la non-limitation des mandats présidentiels en Afrique est la concentration croissante des pouvoirs entre les mains du chef de l'État et de son entourage proche. Cette confiscation du pouvoir s'opère au détriment des autres institutions censées assurer les contrepoids démocratiques et l'équilibre des pouvoirs.


Ibrahim Sawadogo, chercheur au Burkina Faso, souligne ce risque de dérive autoritaire : « Lorsque l'exécutif se retrouve dans une dynamique où il sait qu'il n'est pas dans une prédisposition à respecter la constitution, on se retrouve dans des régimes avec une prédominance de l'exécutif qui ne laisse pas véritablement place à une séparation stricte des pouvoirs ». Cette dynamique de maintien présidentiel sur les autres pouvoirs est facilitée par le fait que, dans de nombreux pays africains, les Constitutions sont souvent révisées de manière unilatérale par le chef de l'État pour s'arroger davantage de prérogatives. Les contrepouvoirs institutionnels comme le Parlement, le Conseil Constitutionnel ou les autorités indépendantes de régulation sont alors progressivement domestiqués ou court-circuités.

Le pouvoir législatif pâtit d'un grave déficit de légitimité et d'indépendance lorsque les parlementaires sont élus sur des bases non démocratiques ou inéquitables. Un expert béninois notait que « dans la plupart des régimes africains, les députés sont soit achetés, soit nommés par le pouvoir en place ». Leur allégeance va alors naturellement au Président de la République plutôt qu'à l'intérêt général. Le Parlement est vidé de sa substance démocratique et se contente d'avaliser les décisions de l'exécutif.

Les dernières réformes constitutionnelles visant à proroger les mandats présidentiels au Tchad, en Guinée, en Côte d'Ivoire ou au Congo ont ainsi pu être adoptées par des Parlements inféodés, en dépit des vives protestations populaires. Un constat similaire avait été dressé dès 2009 au Cameroun et au Nigéria lorsque les limitations des mandats présidentiels avaient été levées par des assemblées législatives domestiquées.

Au-delà du Parlement, la mise au pas des autres institutions de contre-pouvoir suit généralement une trajectoire similaire. Le Conseil Constitutionnel, censé être la garante du respect de la loi fondamentale, est fréquemment remanié de manière à y placer des personnes dévouées au chef de l'Etat. Au Burkina Faso, la révision constitutionnelle de 1997 permettant la levée de la limitation des mandats avait été avalisée par une Cour Constitutionnelle de circonstance, intégralement remaniée quelques semaines auparavant. Des trajectoires analogues de capture institutionnelle ont été documentées au Cameroun, au Togo, en Ouganda ou au Burundi.

Les autorités administratives indépendantes de régulation dans les domaines électoraux, médiatiques ou de la bonne gouvernance connaissent un genre similaire. Elles sont neutralisées par des nominations partisanes ou par un encadrement très strict de leurs prérogatives et moyens d'action, les rendant impuissantes face aux dérives du pouvoir exécutif. Au Cameroun, plusieurs ONG de défense des droits humains ont décrété le « contrôle très serré » exercé par le pouvoir sur l'ensemble des institutions de contre-pouvoirs, vidant de leur substance les dispositifs de surveillance démocratique. La Commission Électorale Nationale est ainsi devenue dans de nombreux pays un organe d'habillage formel sans réelle indépendance.

Ces différents exemples illustrent la dynamique bien réelle de capture progressive de toutes les institutions démocratiques par le pouvoir dans un contexte de non-limitation des mandats présidentiels. Exit les contre-pouvoirs institutionnels, le chef de l'État règne alors en maître absolu sur un pays soumis. Cette concentration des pouvoirs facilite grandement les dérives personnelles du Prince, selon le chercheur Mahmoud Abdallah, auteur d'une étude comparative sur les présidences à vie en Afrique (2017) : « L'affaiblissement des garde-fous institutionnels ouvre la voie à l’accompagnement des richesses nationales, à l'utilisation de la violence d'Etat pour se maintenir et à la confiscation du pouvoir par une ethnie ou une région spécifique ».

L'analyse détaillée des différents cas nationaux met en lumière une dynamique récurrente d'affaiblissement progressif et concerté de tous les contre-pouvoirs lorsqu'un Président s'éternise au pouvoir sans limitation de mandat. Cette concentration abusive de tous les leviers du pouvoir entre les mains de l'exécutif présidentiel conduit inévitablement à saper les fondements mêmes de l'État de droit démocratique. Ce terreau de l'hyper-présidentialisme nourrit également les risques d'une administration partielle et inique de la justice, question cruciale que nous allons à présent approfondir.


  1. Administration judiciaire inique


L'indépendance de la justice et la primauté du droit sont des piliers indispensables de tout État démocratique. Pourtant, de nombreux témoignages concordants dans les entretiens réalisés soulignent les ingérences et instrumentalisations du système judiciaire lorsqu'un président s'éternise au pouvoir.

L’enseignant chercheur togolais interviewé dénonce sans détour : « Les institutions sont manipulées par le jeu politique et la toute-puissance d'un président. Des personnalités sulfureuses sont à la tête des juridictions clés qui ne peuvent jamais dire le droit tel qu'il se présente ». La mainmise du pouvoir exécutif sur l'appareil judiciaire est ici clairement pointée du doigt.

Cette partialité de la justice est facilitée par divers leviers d'influence et de pression dont disposent les présidents face à des magistrats souvent précaires. « Les nominations aux hautes juridictions deviennent un instrument de contrôle politique du pouvoir », analysent deux juristes spécialistes des systèmes africains.

Au-delà des hautes cours, les ingérences politiques du pouvoir s'opèrent à tous les échelons de la pyramide judiciaire. Ainsi à Djibouti, « de nombreux juges ont été destitués ou transférés vers des postes subalternes pour s'être opposés aux décisions du pouvoir ». Ces pratiques corruptives alimentent un climat de crainte et de soumission au sein d'une institution qui devrait pourtant être l'un des derniers remparts de l'État de droit.

« La perception est celle d'une justice qui s'est patrimonialisée, où le respect des droits fondamentaux n'est plus garanti puisque personne n'a de compte à rendre », résume le professeur de l’Université Catholique d’Afrique Centrale, interviewé. Ce constat accablant en dit long sur le défaut de la séparation des pouvoirs dans un contexte de présidence perpétuelle.

Au-delà des nominations partisanes, de multiples autres leviers sont activés pour neutraliser l'indépendance et l’équité de la justice. Certains régimes recourent à des réformes légales pour restreindre les compétences et les moyens des juridictions, les rendant impuissantes face aux abus du pouvoir politique.

Au Tchad, où Idriss Déby a régné d'une main de fer pendant 30 ans jusqu'à son décès en 2021,

« La grande majorité des juridictions civiles les plus importantes ont été dissoutes ». Un mouvement similaire de démantèlement de la justice indépendante a été observé en Ouganda sous le règne de Yoweri Museveni. L'instrumentalisation peut également prendre la forme de pressions politiques diffuses, d'intimidations et même de menaces sur les magistrats. Ceux qui tentent de s'affranchir de la tutelle présidentielle sont fréquemment la cible de campagnes de dénigrement dans les médias aux mains du pouvoir.


Un rapport de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (2016) a ainsi documenté les cas de plusieurs juges congolais victimes de telles « attaques incessantes », allant jusqu'à des menaces de mort pour s'être opposés à la volonté de Sassou Nguesso de briguer un nouveau mandat malgré l'interdiction constitutionnelle. 

L'instrumentalisation politique du système judiciaire s'exprime aussi à travers les procédures judiciaires elles-mêmes, devenues de redoutables armes de répression et de musellement des voix dissidentes. De nombreux juristes et ONG ont documenté une multiplication alarmante de poursuites judiciaires abusives, des arrestations et emprisonnements arbitraires visant l'opposition politique et la société civile critique. « Les procédures-bâillons contre les médias sont monnaie courante, enfreignant la liberté de presse. Des dirigeants politiques sont tout simplement interdits de séjour dans leur propre pays », témoigne l’enseignant chercheur togolais interrogé. Ce constat fait malheureusement écho à de trop nombreuses autres situations.

Au Burundi, la présidence de Pierre Nkurunziza à partir de 2015 s'est accompagnée d'une vague de répressions judiciaires d'une ampleur inédite selon une enquête de la Fédération internationale des ligues des Droits de l'Homme. Celle-ci a documenté plus d'un millier d'arrestations arbitraires, des centaines de cas de tortures, des disparitions forcées, et au moins 25 personnes ayant trouvé la mort lors de leur détention.

La même ONG a également décrété « l'emploi massif d'instruments judiciaires à des fins politiques » par le régime d'Alpha Condé en Guinée entre 2010 et 2021. Plusieurs figures de l'opposition ont écopé de lourdes peines pour des motifs politiques, à l'émission de procès iniques sans aucune garantie d'équité.


L'appareil judiciaire sert alors non plus à rendre la justice mais à « fabriquer des détenus d'opinion » en étouffant les revendications citoyennes par la force, dénonce un rapport d'Amnesty International sur les abus des tribunaux militaires au Cameroun contre les populations anglophones.

Un cas emblématique et tristement célèbre est celui de l'opposant Maurice Kamto au Cameroun.

Arrivé deuxième à la présidentielle de 2018 après Biya au pouvoir depuis 36 ans, il a été arrêté et condamné à 3 ans de prison ferme pour « insurrection » après avoir contesté la régularité du scrutin et les résultats annoncés. Une peine d'une exceptionnelle sévérité selon de nombreux observateurs indépendants, visant à le faire taire et à l’écarter de la scène politique.

Cette judiciarisation des conflits politiques ouvre la voie à de multiples dérives liberticides, comme en témoigne la multiplication des tribunaux d'exception et de juridictions militaires pour juger des civils. Au Tchad toujours sous Déby, une Cour criminelle spéciale « est devenue le passage obligé pour condamner quasi-systématiquement tous les opposants au régime » selon un rapport de l'ONU.

L'instrumentalisation politique du système judiciaire laisse également la porte ouverte à des formes d'État de non-droit plus radicales, faisant durablement vaciller les fondamentaux mêmes de l'Etat de droit. Le cas le plus frappant est sans doute celui du président Teodoro Obiang Nguema en Guinée Équatoriale, après 43 années de règne sans partage, « le régime applique un déni systématique et absolu de justice à ses citoyens » selon le bilan accablant dressé par Amnesty International. Cette soumission du droit au fait politique vise à légitimer les abus de pouvoir et justifier ce que d'aucuns qualifient d’un « État de non-droit permanent ». Les juges devenant de simples auxiliaires du pouvoir dictatorial, le fondement même du principe de la séparation des pouvoirs s'effondrent.

L'analyse détaillée a mis en lumière les nombreuses formes d'ingérence et d'instrumentalisation politique de l'appareil judiciaire lorsqu'un Président de la République s'éternise au pouvoir, sapant durablement les fondements de l'État de droit. Cette concentration du pouvoir impacte également la sphère économique, comme nous allons l'aborder dans la partie suivante.


Partie II : Impacts socio-économiques de la non-limitation des mandats présidentiels

L’économie d’un pays constitue l’épine dorsale de son développement. Les capacités économiques d’un pays déterminent en grande partie la capacité de son gouvernement à mettre en œuvre les politiques publiques et répondre aux besoins de la population. Dans les pays considérés comme démocraties exemplaires, le constat est que les dirigeants n’hésitent pas à démissionner de leurs fonctions en cas d’improductivité ou de mauvaise gérance, suscitant le mécontentement du peuple. Quant aux dirigeants africains, ils s’attachent davantage au pouvoir malgré le rejet de leurs populations dans de nombreux cas. Ceci est à l’origine de nombreux coups d'État et insurrections. 

La tendance des dirigeants africains à vouloir se maintenir au pouvoir et faire des mandats illimités est souvent liée aux avantages et prestiges dont ils bénéficient grâce à l’exercice de leurs fonctions. La corruption et les détournements de fonds publics, la patrimonialisation sont monnaie courante dans ces États africains. Ces pratiques réduisent considérablement les capacités économiques de l’Etat en vidant les deniers publics à des fins personnelles et portent préjudice aux activités socio-économiques. Cette situation impacte ainsi le développement de la nation et joue sur le bien-être des populations. (Chapitre I)

Nombre de pays africains connaissent ou ont déjà connu des situations économiques désastreuses en raison de la mal gouvernance inhérente à la non-limitation des mandats présidentiels, ou à la volonté des présidents de prolonger leurs mandats contre la volonté populaire et/ou les lois établies. (Chapitre II)  


Chapitre I : Impacts sur le bien-être et le développement

Les contrecoups de la non-limitation des mandats présidentiels ou les tentatives d’outrepasser le nombre de mandats présidentiels prévus par la constitution en s’appuyant sur des interprétations houleuses ou des modifications illicites de ladite ou autres stratagèmes politico-politiciens, ne se limitent pas à des bouleversements de la vie sociale et politique mais se font également ressentir dans la vie économique. D’une part, ces pratiques constituent un frein au bien-être socio-économique du pays et entravent l’épanouissement des populations (A). D’autre part, elles peuvent obstruer au développement de la société par la redistribution équitable des richesses et la mise en œuvre de politiques sociales efficaces. (B)

 Instabilité et décroissance des performances économiques


Les troubles et bouleversements socio-politiques qui résultent des tripatouillages constitutionnels permettant d’aboutir à des mandats présidentiels illimités, portant ainsi atteinte à la paix et stabilité dans un pays ont un impact direct sur ses activités aux niveaux macro et micro-économiques.

Alors que la paix et la stabilité d’un pays sont facteurs de développement en ce qu’elles constituent des conditions favorables à la productivité des activités économiques, l’instabilité produit des effets contraires. 

Illustrant cette réalité, la croissance économique du PIB au Togo a infléchi en 2017 passant de 5,47 en 2015 à 4,01 à la suite des soulèvements populaires contre le régime en place pour une réforme constitutionnelle afin de restaurer la limitation des mandats présidentiels dans la constitution.

En examinant les rapports de la Banque mondiale, on remarque que  les tentatives des Présidents sénégalais de faire plus de deux mandats ont eu des répercussions sur la croissance économique de l’année suivant leurs exactions.

Les échos d’une volonté de Macky Sall de se présenter dans le but de faire un troisième mandat a ébranlé la paix sociale dès l’année 2021. On constate par la suite un ralentissement de la croissance du PIB en 2022, passant de 6,5 à 4,2. 

Lorsque l’on remonte à la tentative de Abdoulaye Wade de se maintenir au pouvoir en 2012, on note également une baisse de la croissance du PIB de l’année 2013 passant 4,01 (en 2012) à 2,4 en 2013.

Mady CISSE, économiste au Centre d’Etudes pour le financement du développement local (CEFDEL), nous révèle qu’en réalité :

« Pour le cas spécifique du Sénégal, la logique d’outre passer les deux mandats n’obéissent pas à une logique de stabilisation (cas de certains pays), mais répondent à une tentative de préservation des intérêts économiques et financiers. Au Sénégal, les institutions sont solides bien que des lacunes existent dans les prises de décision et le degré de maturité des populations dans enjeux politiques est très élevé. Donc, la logique économique est impulsée par une culture rentière du cercle restreint du pouvoir, les fortes accointances du pouvoir religieux au pouvoir politique. L’autre facteur clé est l’implication de la France sur le candidat qui répond mieux à ses intérêts économiques. Pour rappel, la France est le premier investisseur en termes d’IDE au Sénégal et compte plus de 250 entreprises dans le secteur moderne. 


Quant au Cameroun, il est difficile de démontrer une relation entre baisse de croissance économique et non-limitation des mandats. A cet effet, il nous a été révélé que « curieusement, les rapports des organismes nationaux montrent une certaine amélioration des performances dans la période suivant la levée de la clause de limitation des mandats en 2008 par rapport à la période de non-limitation des mandats dans les années 90 constituant des années de crise un peu partout en Afrique.» Néanmoins, il est important de souligner que la relance économique du Cameroun au lendemain de la crise des années 80 et 90 a été impulsée avant que la clause de limitation de mandat ne saute en 2008. 

Établi dans une situation de gouvernance perpétuelle, l’analyse de la croissance économique du Congo révèle une évolution économique très instable. Le pays se retrouve assez souvent dans des circonstances de régression économique avec un taux de croissance de valeur négative. La chute la plus notoire est constatée en 2016, année électorale avec un taux de croissance économique égal à -8,69.

Au quotidien, ces constats se traduisent par la faiblesse des recettes réalisées par les acteurs économiques en situation d’instabilité socio-politique de leur pays. Les plus affectés sont les travailleurs du secteur informel, soit la majorité des travailleurs africains, (85,8% des travailleurs en Afrique occupent un emploi informel) en particulier les commerçants dont une journée de travail manquée signifie d’énormes pertes et laisse place à un déficit non-négligeable sur leurs revenus. Les activités de transport et de tourisme sont violemment affectées. Au Sénégal, « les services du Fonds Monétaire International (FMI), dans leur communiqué de septembre 2023, indiquaient que la situation sociopolitique (manifestations contre le troisième mandat et l’arrestation du chef de l’opposition)  tendue a pesé sur l'activité des secteurs du commerce et des services au cours du premier semestre de cette année, ce qui a conduit à une révision à la baisse des prévisions de croissance du PIB, qui sont passées de 5,3 % à 4,1 %, soit une perte de croissance de 1,2 point. »


Le témoignage d’un commerçant, victime des turbulences politiques de son pays en lien avec la tentative d’outrepasser la limitation des mandats au Sénégal se traduit en ces phrases : « Lors des manifestations pour le respect de la limitation du nombre de mandats présidentiels en 2011-2012, je n’arrive pas à vendre mes marchandises. J’ouvre ma boutique mais je ne reçois aucun client à cause des manifestations. Durant les jours sans manifestation, je peux vendre jusqu’à 25 à 50 articles alors que quand il y a des troubles politiques je n’arrive même pas à vendre un seul article et c’est déplorable. Lorsque j’entends qu’il y’aura une manifestation automatiquement je sais que je ne vais pas vendre ce jour. Avant qu’elles ne commencent, j’arrive à vendre certains produits mais dès qu’elles commencent je suis obligé de fermer ma boutique et rentrer à cause du gaz lacrymogène.»


Telles sont les conséquences des mandats présidentiels illimités qui suscitent le mécontentement de la population qui se sent ainsi opprimée et dépourvue de son droit de choisir librement son dirigeant et d’expérimenter les bienfaits de l’alternance démocratique. 


  1. Evolution des IDH et politiques sociales 

Les politiques sociales peuvent être définies comme des résolutions prises par l’Etat pour pallier au déficit des politiques publiques. 

Elle témoigne d’une certaine solidarité nationale où la redistribution des richesses permet de tendre la main aux plus vulnérables et assurer l’équité. Selon l’Organisation Internationale du travail (OIT), « Ces politiques expriment non seulement l’effort collectif d’une communauté pour protéger ses membres les plus faibles, mais elles doivent aussi satisfaire les besoins sociaux de tous. » Fille de politique sociale, la protection sociale est considérée comme une institution de la démocratie.  

Cependant, les pays avec une non-limitation des mandats dont la gouvernance laisse à désirer ne sont pas en mesure de garantir à leurs populations un système de protection sociale efficace qui répond à leurs besoins. 

Comme évoqué précédemment, dans certains contextes, les fonds alloués à certains projets à destination de la société, soit dans le but de soulager les plus pauvres en leur permettant d’accéder aux soins médicaux de qualité à peu ou moindre coût se transforment plutôt en prétexte pour enrichir illicitement les gouvernants en détournant les fonds prévus à cet effet. 

Au Cameroun, les propositions de réformes de la protection sociale suivant une logique “Top down” sont d’ordre social, économique et politique et comprennent la fragilité ou l’étroitesse des coalitions politiques formées autour de la protection sociale, la croissance du secteur informel, le développement du sous-emploi, la corruption et la mauvaise gouvernance.  Les programmes de protection sociale et d’emploi ne couvrent que 5% de la population camerounaise selon les données les plus récentes recueillies par la Banque mondiale en 2014. 

Malgré les projets de protection sociale mis en place comme le Cadre Stratégique de lutte contre la pauvreté (CLPS), et l’adoption de politique nationale de protection sociale (PNPS) initié par le gouvernement de Blaise Compaoré au Burkina Faso, les populations burkinabè souffrent de plusieurs maux liés aux longues années de mal gouvernance conduisant à la résurgence des coups d’Etat. Tout compte fait, le taux de couverture des programmes de protection sociale et d’emploi au Burkina Faso s’élève à 55% en 2018 selon la Banque mondiale. 

Au Togo, il est estimé à 17% et à 39% au Sénégal en 2018. N’ayant pas connu de guerres à la suite de son indépendance, le Togo fait cependant partie des pays du monde où les populations sont les plus malheureuses à l’analyse des « World Happiness Report » élaborés par l’ONU. C’est une situation préoccupante pour les élites du Togo.

Par ailleurs, les Indices de Développement Humain (IDH) sont connus pour mieux refléter mieux le développement en ne se limitant pas à son aspect économique. L'Indice de Développement Humain (IDH) initié par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) est une mesure composite qui intègre trois piliers essentiels du développement humain. La première composante, l'espérance de vie à la naissance, évalue la capacité à vivre longtemps et en bonne santé. Les deux autres composantes, à savoir la durée moyenne de scolarisation et la durée de scolarisation attendue, mesurent la capacité à acquérir des connaissances. Enfin, le revenu national brut par habitant reflète la capacité à maintenir un niveau de vie décent. 

Les statistiques du PNUD montrent une évolution positive des IDH dans plusieurs pays africains. C’est le cas au Togo, au Cameroun, au Burkina Faso et au Sénégal de la période de 2000 à 2019. Selon le rapport du PNUD publié en 2023, l’IDH du Togo est en perpétuelle évolution. Il est passé de 0,484 en 2014 à 0,487 en 2015, puis, 0,503 en 2017, 0,513 en 2018, 0,515 en 2019-2020 puis à 0,539 en 2021-2022.

Le Congo manque à cette croissance perpétuelle. L’IDH a en effet chuté de 0,608 à 0,574 entre 2018 et 2019. Compte tenu des potentialités du Sénégal, il est indéniable que les incidences socio-politiques au Sénégal liés aux débats et manifestations sur la non-limitation des mandats ajoutées à d’autres facteurs ont retardé son développement humain. L’analyse de Mady CISSE, économiste sénegalais nous permet de constater :

 « Le Sénégal a perdu 16 places dans le classement de l’IDH, en passant de la 154ième /186 pays en 2012 au 170ième/191 pays en 2021. Par contre, la valeur de l’indice a progressé pour la période considérée de 0,470 à 0,511, soit une hausse de 0,041. Donc, le recul du Sénégal dans le classement s’explique potentiellement par le fait que les autres pays ont enregistré plus de performances dans les critères de l’IDH, pour sortir de la catégorie « développement humain faible ». A titre illustratif, en 2012, 44 pays ont enregistré un IDH de la catégorie « développement humain faible » contre 31 pays en 2021. Donc, 13 pays ont pu sortir de la catégorie « développement humain faible » entre 2012 et 2021, pour le statut de « développement humain moyen ». En 2021, le Sénégal reste un pays au développement humain faible et n’a devancé que 21 pays sur les 191 du classement du PNUD»


Chapitre II : Mal gouvernance économique

Dans un contexte de mandats présidentiels illimités en Afrique, le moment de remise en cause de la légitimité acquise et de sanction positive ou négative des mandataires, que constitue l’élection a le plus souvent une issue connue d’avance car les occupants du pouvoir font recours à une panoplie de mécanismes permettant au Président de la République de garder son fauteuil. Comme la célèbre expression de l’ancien Président de la République du Congo, Pascal Lissouba, « En Afrique, on n’organise pas des élections pour les perdre ». 

Avec des élections gagnées d’avance à date échue, le moment décisif que devrait constituer l’élection semble perdre sa valeur. Une gestion saine et efficace de la chose publique à travers la mise à profit des deniers publics pour le bien-être de la population et la reddition des comptes semble être dans l’impossibilité de prospérer dans un tel paradigme (A). De même, il apparait difficile de miser sur la transparence et la lutte contre la corruption dans de telles circonstances (B).  


  1. Absence de reddition des comptes et détournements des deniers publics


La reddition des comptes en démocratie implique que les agents de l’administration publique qu’ils soient élus ou non puissent répondre de leurs actes et être responsables devant le peuple en justifiant leur utilisation des fonds publics. Ne se limitant pas à l’aspect financier, la reddition des comptes signifie également que ces agents répondent de leurs actes aux niveaux politique et administratif. Ils peuvent dès lors faire l’objet de poursuites judiciaires en cas de dérogation à cette obligation ou de détournements des deniers publics à des fins d’enrichissement personnel. 

La reddition des comptes mise sur la transparence et une bonne administration des affaires publiques permettant de limiter les effets néfastes de la corruption et ainsi parvenir au développement. Son importance peut se mesurer à l’aune des institutions établies aux niveaux national, national et régional pour assurer un contrôle de la conformité des actions entreprises par les décideurs politiques, ou de leur gestion des ressources économiques confiées à leur charge, avec les objectifs fixés et les résultats obtenus.

En effet, beaucoup de pays africains sont dotés d’un cadre juridique propice ainsi que d’institutions et d’organes dont les missions sont clairement définies pour assurer une reddition des comptes efficace. Au Burkina Faso, le rôle de la cour des comptes se décline en deux missions principales, la première est administrative et consiste à contrôler le budget et la gestion des organes de l’Etat. La seconde est d’informer l’Assemblée nationale et le Président de la République sur les activités menées et les résultats obtenus. Il en est de même au Togo et au Sénégal conformément aux dispositions prises par le Traité de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) du 10 Janvier 1994.

L’organe chargé de la reddition des comptes au Cameroun est la chambre des comptes dont le champ de missions est élargi. Il se conforme aux dispositions prises par la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC). En plus des missions de la précédente cour, elle a un rôle de juge et d’évaluation des performances des politiques et des administrations publiques. En dépit de cet environnement normatif, le fonctionnement effectif de ces organes n’est pas garanti. On constate d’une part le retard ou l’irrégularité dans la publication des rapports annuels sous la responsabilité des Institutions Supérieures de Contrôle de finances publiques (ISC) ou encore leur manque de traduire fidèlement la réalité des faits. Au Sénégal par exemple, le dernier rapport annuel publié par la cour des comptes date de 2017. Au Cameroun, il date de 2021. En ce qui concerne le Togo, il est difficile de voir des rapports annuels de la cour des comptes, on note plutôt une quasi-inexistence de ces rapports. Un rapport public a été publié concernant la période 2009-2015. 

D’autre part, les recommandations faites par les ISC peinent à trouver suite en termes d’application. Pire encore, lorsque certains rapports divulgués épinglent des personnalités politiques, le constat est que les procédures judiciaires qui devraient suivre font défaut.

Dans un contexte de mandats présidentiels illimités, la reddition des comptes peine à trouver son plein essor pour permettre aux populations de bénéficier de ses bienfaits. Elle rencontre plusieurs obstacles en raison des facteurs comme l’hyper présidentialisme, le non-renouvellement des élites dirigeantes et la patrimonialisation des institutions étatiques. 

L’hyper présidentialisme se traduit par un trop plein de pouvoirs constitutionnels conférés au Président de la République. Il a le dernier mot sur les institutions et a la capacité de faire prévaloir sa volonté sur elle aux dépens de l’intérêt général de la nation. Conduisant à un autoritarisme, le Président de la République a la possibilité d’empêcher la publication des rapports des ISC quand ceux-ci vont à l’encontre de ses intérêts ou pourraient porter préjudice à son entourage politique. C’est ce qui explique de la non-publication de certains rapports bien que réalisés par les organes en charge. 

Quand ceux-ci sont néanmoins publiés, le poids décisif du Président de la République peut constituer un obstacle à ce que les procédures judiciaires suivent leur cours normal et aboutissent à des sanctions des acteurs épinglés. Allant dans ce sens, il nous a été témoigné par Mady CISSE, économiste sénégalais, qu’au Sénégal, « la qualité de la gouvernance dans la gestion des finances publiques ou ressources du pays est juste mauvaise. Sous le règne de Macky SALL, aucun rapport des corps de contrôle que ce soit la cour des comptes, l’IGE, l’inspection générale des finances n’a fait de l’objet de poursuites judiciaires. Par exemple, pendant 12 ans, aucun rapport de l’Inspection général d’Etat (IGE) n’a été publié, excepté celui concernant la liquidation politique de l’ancien Maire de Dakar à l’élection présidentielle de 2019. »

Comme conséquence, l’on voit la multiplication des projets appelés « éléphants blancs » qui désignent des projets sollicitant d’importants investissements et dont la matérialisation est vide. Dans ces cas de figure, le fossé entre le projet annoncé, ses bienfaits vendus pour susciter l’adhésion populaire et ce qu’il en résulte une fois réalisé est énorme. Ils constituent des moyens d’enrichissement illicite des agents gouvernementaux et de détournements des deniers publics.

Au Togo, on peut citer l’exemple du projet d’hôpital Saint-Pérégrin dont les coûts s’élevaient à 17 milliards de FCFA en 2020 et devait commencer à être fonctionnel en juillet de ladite année. Sur le portail officiel de la République, on peut lire « De niveau 4, ce sera un hôpital de référence dans la sous-région, répondant à tous les standards internationaux et doté d’un vaste plateau technique, d’un hôtel 4 étoiles et d’un héliport entre autres. » Ce n’est que le 1er Mars 2023, que cet hôpital a commencé ses activités sous une nouvelle appellation soit, Hôpital Dogta-Lafie dont les coûts s’élèvent désormais à 25 milliards.

En complicité avec le chef d’Etat, les personnalités publiques impliquées dans ce type de projets ne sont aucunement contraintes à rendre compte de leurs dépenses. Il en résulte que les populations restent dépourvues de services sociaux de base pendant que les têtes dirigeantes continuent de s’enrichir et de vivre dans l’opulence. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les règles sur la déclaration des avoirs consacrée par les constitutions comme celle du Cameroun et les lois d’autres pays africains peinent à être respectées ou appliquées par les concernés. 

Dans des pays africains en général, lorsqu’un individu occupe une haute fonction administrative ou politique, il n’est que question de temps pour que celui-ci commence à afficher un train de vie somptueux, échappant à toute obligation de transparence sur l’acquisition de ses biens. Assez souvent, les proches du Président se retrouvent au cœur de scandales politiques relatifs aux biens mal acquis.

Depuis 2008 au Cameroun, la clause de limitation des mandats présidentiels a été levée. Paul Biya gouverne officiellement le pays depuis son élection en 1982 avec l’appui d’un gouvernement qu’il a formé. Faute d’alternance politique permettant de renouveler la classe politique et les élites dirigeantes, le Cameroun est dirigé par le même groupe de personnes depuis plusieurs années. La non-limitation des mandats ne se limite pas à la présidence mais s’étend à toutes les sphères de l’administration et aux différentes strates de la société. 

A l’image du Chef de l’Etat, la jeunesse n’est pas l’une des caractéristiques phares de ces élites dirigeantes. « Les institutions étatiques sont dirigées par des personnes suffisamment âgées. On remarque des ministres qui occupent leurs postes depuis  plusieurs décennies » nous a révélé le professeur BEKONO. Contrairement aux jeunes connus pour leur fougue, leur sens de l’innovation et du changement, on rencontre un groupe de personnes qui, devenues confortables avec le statuquo, ne souhaitent que conserver leurs privilèges. Dans de tels contextes, on assiste à la routinisation de la gestion de la chose publique en manque d’innovation. En d’autres termes, ce sont les mêmes personnes qui conservent les mêmes habitudes et produisent donc les mêmes résultats. En outre, le non-renouvellement de l’élite dirigeante entraîne la stagnation des idées, des politiques et des pratiques en place minant ainsi le progrès et le développement par l’innovation. 

Déconnectés de la population au fil des années, ces gouvernants n’arrivent pas à cerner les besoins réels des populations pour y répondre adéquatement. Aussi, leur sens de redevabilité face à la population est-il très limité. Du fait de leurs longues années d’exercice de leurs fonctions sous l’égide du Président de la République « permanent », ceux-ci ne craignent pas une remise en cause de leur légitimité en tant que dirigeants. Par conséquent, leurs préoccupations majeures résident plus dans le fait de répondre aux attentes du Président de la République afin de préserver les intérêts du petit groupe à la tête de l’Etat plutôt que ceux de la population. 

  1. Corruption endémique 

Transparency International définit la corruption comme « l’abus d’un pouvoir confié à des fins privées ». Elle est perçue comme un phénomène prépondérant en Afrique qui a un impact aussi bien sur « l’économie nationale, sur l’efficacité de l’aide publique que sur le revenu et les dépenses des ménages ». La lutte contre la corruption occupe en réalité une place centrale dans les efforts de bonne gouvernance démocratique. Elle est corollaire à la reddition des comptes. 

Bon nombre d’organisations internationales à l’instar de l’Office des Nations Unie contre la Drogue et le Crime (ONUDC), Organisation for Economic Co-operation and Development (OECD), et Transparency International œuvrent hardiment dans la lutte contre la corruption. Ces organisations ont mis en place des indicateurs permettant d’évaluer le niveau de corruption dans un pays.  Parmi ceux-ci, on peut retenir l'Indice de Perception de la Corruption (IPC) de Transparency International, l'Indice de la Corruption de la Banque mondiale, l'Indice Mo Ibrahim de la gouvernance en Afrique et l'Indice de la Corruption de l'ONG Global Integrity. Ces indices évaluent divers aspects de la corruption tels que la perception de la corruption dans le secteur public, les pratiques de corruption, la transparence des institutions gouvernementales, entre autres.  

L’IPC de Transparency International permet de classer les pays en fonction de la perception du niveau de corruption au sein de leur secteur public sur une échelle de zéro à 100. La première indiquant un niveau élevé de corruption et la seconde aucune corruption. Dans son rapport de l’année 2023, faisant état de la corruption dans le monde, on constate que les pays africains sans limitation des mandats ou ayant adopté la clause de limitation des mandats dans un passé récent ont un score faible en IPC. Cependant, les démocraties exemplaires comme le Cap Vert et le Botswana figurent dans le top 50 du classement. 

Le Togo occupe la 126ème position sur 180 pays classés, avec un score de 31. Le Cameroun a un score de 26 et occupe 150ème rang. La Guinée Equatoriale fait partie des pays les plus corrompus du monde avec un IPC égal à 17/100. 


Pays

Score/100

Rang mondial


Erythrée

21

161

Burundi

20

162

Tchad

20

162

Comores

20

162

République démocratique du Congo

20

162

Soudan

20

162

Libye

18

170

Guinée équatoriale

17

172

Soudan du Sud

13

177

Somalie

11

18


Source: Transparency International

L’analyse a montré que la corruption a tendance à éclore dans des contextes d’autoritarisme, d’absence de l’Etat de droit et de non-respect des droits humains. La capacité du système judiciaire à efficacement jouer leur rôle a un impact direct sur les activités de corruption. En inhibant l’indépendance de la justice, l’on pose un cadre favorable à la floraison de la corruption. 

Selon François Valerian, président de Transparency international, « La corruption continuera à prospérer tant que les systèmes judiciaires ne pourront pas sanctionner les actes répréhensibles et maintenir les gouvernements sous contrôle. Lorsque la justice est achetée ou fait l'objet d'ingérences politiques, ce sont les citoyens qui en pâtissent. »

A cet effet, l’UA a mis en place un programme régional en Afrique de lutte contre la corruption dans lequel il est révélé que la corruption fait partie des problèmes les plus endémiques du continent africain. Bien qu’existant partout dans le monde, ses répercussions se font davantage ressentir dans les pays pauvres ou en développement. C’est le cas en Afrique où les fonds publics sont souvent détournés par des individus entravant ainsi le développement et aggravant la pauvreté. 

 L’UA impose aux pays africains la création d’organes chargés de lutte contre la corruption. C’est la raison d’être des Inspections générales des finances et des Offices ou commissions nationales de lutte contre la corruption que l’on retrouve dans différents pays africains. La patrimonialisation de la justice freine cependant leur efficacité.

  1. Recommandations

 Recommandation 1 : Sanctuariser la clause de limitation des mandats présidentiels dans la Constitution

Pour éviter les dérives de présidences perpétuelles et interrompre la dynamique de concentration des pouvoirs, il est primordial d'inscrire dans la loi fondamentale une limitation ferme du nombre de mandats, par exemple à un mandat renouvelable une seule fois. Ces dispositions constitutionnelles doivent être intangibles, c'est-à-dire qu'elles ne pourront faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle. Seul un processus de révision constitutionnelle extrêmement rigoureux et soumis à l'approbation populaire pourrait permettre de modifier ces verrous démocratiques.


Recommandation 2 : Renforcer l'indépendance des institutions de contrôle démocratique

Pour lutter contre la domestication des contre-pouvoirs institutionnels, des réformes en profondeur sont nécessaires afin de garantir la réelle indépendance des institutions clés comme la justice, les autorités de régulation, les médias publics, etc. Cela passe par des processus de nominations totalement impartiaux, des moyens renforcés, et l'impossibilité pour l'exécutif de révoquer discrétionnairement leurs membres. L'instauration de contre-pouvoirs institutionnels forts et autonomes est un rempart indispensable contre la confiscation du pouvoir.


Recommandation 3 : Créer une haute juridiction constitutionnelle continentale

Pour assurer un contrôle externe impartial du respect de l'Etat de droit et des normes démocratiques fondamentales, il pourrait être opportun de créer une haute cour constitutionnelle panafricaine indépendante. Celle-ci serait notamment compétente pour se prononcer de manière contraignante sur la régularité des processus électoraux et changements constitutionnels dans les différents pays. Disposant de moyens d'investigation et de sanction crédibles, cette juridiction indépendante aurait pour mission de prévenir les captations du pouvoir et les dérives autoritaires. Les instances régionales existantes, comme la Cour de justice de la CEDEAO, rencontrent des difficultés à voir leurs décisions appliquer par certains pays lorsqu'elles vont à l'encontre des intérêts des dirigeants en place. Alors pour surmonter cet écueil majeur, certains leviers complémentaires devraient être activés afin que les décisions de cette juridiction constitutionnelle continentale aient un effet contraignant. Ce sont :

• Ancrage constitutionnel contraignant : L'autorité de la haute cour devra être inscrite dans un cadre juridique contraignant de type traité international ratifié par les États membres. Toute violation de ses décisions devra être assimilée à une violation du droit international.

• Mécanismes de suivi et de pression : Un mécanisme institutionnel robuste devra être mis en place pour assurer le suivi efficace des décisions et diligenter des missions d'enquête en cas de manquements. Des procédures de concertation mais aussi de pressions graduées (sanctions, suspensions, etc.) devront être prévues. 



Recommandation 4 : Renforcer les capacités de la société civile

Il est crucial d’avoir une société civile indépendante et bien organisée afin qu’elle ait les moyens de lutter contre les dérives du pouvoir politique en renforçant sa capacité à mener des actions de plaidoyer, de suivi et d'évaluation des politiques publiques tout en restant indépendante. Cela permet à la société civile de participer plus activement à l’éveil de la conscience citoyenne pour résister à toute tentative de modification constitutionnelle pilotée par les chefs d'États africains.


Recommandation 5 : Promouvoir l’éducation citoyenne 

Il n’existe pas de démocratie sans démocrates. Il est donc essentiel d’encourager l'éducation civique dans les écoles en incluant des cours sur les institutions démocratiques, les droits de l'Homme et les responsabilités civiques pour permettre aux citoyens de connaitre leurs droits et les outiller à se défendre en cas de violation de ceux-ci ; en organisant des ateliers, des conférences et des formations pour sensibiliser les citoyens aux enjeux sociaux et politiques et les éduquer sur l’importance de participer à la gestion de la chose publique.

CONCLUSION

De nos recherches, il en ressort que l’absence ou le non-respect de la clause de la limitation des mandats présidentiels en Afrique peut constituer un obstacle au développement de la société africaine. Conduisant à une concentration excessive de pouvoirs entre les mains d'un seul individu sur une longue période, la non-limitation des mandats présidentiels crée des conditions favorables à la patrimonialisation du pouvoir politique et laisse libre cours aux dérives du pouvoir. 

Défiant les principes démocratiques fondamentaux et volontés populaires, ces phénomènes suscitent des sentiments d’aversion entre les groupes ethniques par l’exacerbation de leurs différences, creusent le fossé inégalitaire entre les différentes couches sociales en faisant prévaloir les allégeances de certains au pouvoir politique grâce auxquelles il est possible d’être exempté de certaines obligations comme celle de rendre compte au peuple. Cela a pour conséquence d’affaiblir les institutions étatiques au profit du règne de la volonté du chef de l’Etat. 

De plus, la non-limitation des mandats présidentiels décourage la participation citoyenne et le renouvellement de la classe politique, les individus se sentant désabusés par le manque d’alternance au sommet de l’État, et dans une sorte d’impasse où la volonté populaire ne semble pas être en mesure de prévaloir se lassent de participer à la vie socio-politique. 

Les instabilités socio-politiques qui en découlent ont un effet direct sur les performances économiques du pays en limitant les activités génératrices de revenus des individus et réduisant la capacité de l’Etat à efficacement redistribuer les richesses, laissant place à l’enrichissement illicite par le détournement des deniers publics et à une corruption généralisée. 

Par ailleurs, en limitant les alternances politiques et en favorisant la perpétuation d’un même régime, la non-limitation des mandats freine l’émergence de nouvelles idées, de nouvelles perspectives et de nouvelles solutions aux défis rencontrés par le pays. Cela entrave l’innovation sociale, économique et politique nécessaire pour favoriser le progrès et le bien-être des citoyens.

Dès lors, une gouvernance démocratique efficace appelle au renouvellement des élites dirigeantes et à la participation active des citoyens dans la gestion de leur pays, impliquant davantage la jeunesse pour mieux répondre aux besoins de la société africaine dans laquelle elle occupe une place centrale. 


Cependant, les fossés de développement entre les pays africains où la limitation des mandats est effective et ceux où la présidence est perpétuelle semblent ne pas être immenses. De plus, la limitation des mandats n’est pas la garantie d’une bonne gouvernance démocratique favorable au développement de l’Afrique. Ainsi il conviendrait de s’interroger sur les meilleurs modèles de gouvernance des pays africains favorables à leur développement.


BIBLIOGRAPHIE

Sources primaires 


  1. Rapports 
  • Amnesty International, « Détenus d'opinion au Cameroun, la fabrique de prisonniers », 2018 p.42. 
  • Banque mondiale, Situation économique du Burkina Faso, Rapport annuel, 2023 ;
  • Bergen : U4 Anti-Corruption Resource Centre. « Africa: Scale of corruption and impact on poor », Chr. Michelsen Institute (U4 Helpdesk Answer 2003), 2003.
  • FIDH (2016). « Répression contre la justice indépendante au Congo », Rapport n°655, pp.22-29.
  • FIDH « Burundi : une justice aux ordres », Rapport de mission d'enquête, 2018 pp.35-49.
  • Human Rights Watch, « Au Cameroun, Maurice Kamto condamné dans un procès inéquitable », 2018.
  • ONU (2022). « Situation des droits de l'homme au Tchad », Rapport A/HRC/51/96, pp.12-17.
  • ONU. « Situation des droits humains au Tchad - Rapport final », A/HRC/48/84, 2021 pp.22-35.
  • PNUD, « Indices et indicateurs de développement humain 2018 : Mise à jour statistique », 2019
  • PNUD, « Rapport sur le développement humain 2021-2022 : Des progrès notables pour le Togo », 2019.
  • Transparency international, « Indice de Perception de la Corruption 2023 : Une corruption non maîtrisée par des systèmes judiciaires de plus en plus faibles. », 2024.
  • UEMOA, « Guide de gestion axée sur les résultats dans la commission de l’UEMOA. », 2021.
  • Union Africaine, « Lutte contre la corruption, renforcement de la gouvernance en Afrique. », 2016.


II. Sources secondaires 

1) Ouvrages 

  • MEDARD, Jean-François. États d’Afrique noire : Formation, mécanisme et crise. J-F Médard, dir. Paris : Karthala. 1991, 353.p.
  • BEC, Colette. La Sécurité sociale, une institution de la démocratie. Paris, Éditions Gallimard – Bibliothèque des sciences humaines, 2014, 336.p.
  • NAY Olivier, Lexique de science politique, 4e édition, Dalloz, 2017, 1217p.
  • GRAWITZ, Madeleine, « Méthodes des sciences sociales », Paris, Dalloz, 2001.


2) Articles

  • BANGARE, Mourtala & SARR, Alioune, « Systèmes judiciaires en Afrique : Promouvoir l'indépendance ». Presse universitaire d'Amérique, 2019, pp.145-167.
  • BOURHANE, Abdourahman Ayeh. « La justice djiboutienne sous tutelle du pouvoir ». Revue de la Ligue Djiboutienne des Droits Humains, n°27, 2020, pp.8-14
  • DE GRAAF Gjalt, VAN ASPEREN Hanneke, « L’art de la bonne gouvernance : quand les représentations du passé inspirent la pratique moderne », Revue Internationale des Sciences Administratives Vol. 84, 2018 pp. 419-435. 
  • DIARRA Gaoussou, PLANE Patrick. « La Banque mondiale et la genèse de la notion de bonne gouvernance ». Dans Mondes en développement Vol. 2, n°158, 2012. pp. 51-70. 
  • GAZIBO, Mamoudou, « Introduction à la politique africaine. » Montréal : Presses de l'Université de Montréal. 2018, p.93.
  • GNAHOUI, Ernest Hilaire. « Le Parlement du Bénin : une démocratie à bien réelles », Mondes Emergents, vol.3, n°2, 2012. pp.89-103.
  • KENECK-MASSIL, Joseph. « Changement constitutionnel et durée au pouvoir en Afrique : une approche économique », Revue d’économie politique, vol. 129, no1, 2019, p. 105-135.
  • Maître, WANDA, Teodora, « Constitution-Mongering in Nigeria », Journal of African Law, vol.53, n°2, 2009 p.205.
  • MONCRIEFFE, Joy Marie. « Reconceptualizing Political Accountability. » Revue Internationale de Science politique, vol. 19, no. 4, 1998 pp. 387–406.
  • NIKIEMA Hamidou Kader Aristide, « Conflits Communautaires et Paix Sociale au Burkina Faso : Analyse de FOUBÈ ou la Croisade des Femmes de Hamidou Zonga et Jours Sombres en Tagana de Hado Paul Zabré », INTERNATIONAL JOURNAL OF HUMANITIES SOCIAL SCIENCE AND EDUCATION (IJHSSE), Vol.10, 2023, p. 1-12
  • OKOLOUMA, Alex, « La réforme de la protection sociale au Cameroun : vers un changement de logique d’extension de la couverture sociale », Revue française des affaires sociales no. 4, 2019, pp. 189-209. 
  • OTAYEK, René. « Identité et démocratie dans un monde global. » Paris, Presses de Sciences Po., 2000, p.25.
  • VLADIMIR Kourganoff, «  La recherche scientifique », Population, n°4, 1961, p.776
  • WANDJI, Karim. « Les révisions constitutionnelles dans les régimes politiques du monde arabe ». Revue québécoise de droit constitutionnel, n°8, 2017, p.127.
  • WITOLD Raczka, « Le conflit ethnique : sa nature et les moyens de sa prévention par la communauté internationale », RELATIONS INTERNATIONALES, no 88, 1996, p. 397-412.


  1. Webographie



Voir: https://www.courdescomptes.tg/. Consulté le 10/04/ 2024 à 19h30.

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